Dissolution du GUD : comment ça marche ?
Auteurs : Guillaume Baticle et Clotilde Jégousse
À une semaine et demi des élections législatives, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin annonce qu’il va proposer la dissolution du groupuscule d’extrême droite, qui a toujours échappé à la sanction administrative.
En finir avec une organisation qui prône une “suprématie blanche” et tient “des propos antisémites extrêmement graves”. Sur le plateau de BFMTV, mercredi 19 juin, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé son intention de “proposer très bientôt” au Président de la République de dissoudre le Groupe Union Défense (GUD).
L’organisation étudiante d’extrême droite, fondée à l’Université parisienne d’Assas, existe depuis 1968. Réputée pour ses actions violentes, elle a fait l’actualité de la nuit du 9 juin dernier, après la victoire du Rassemblement National aux élections européennes. Quatre militants du groupe, dont l’un de ses chefs de 23 ans, Gabriel Loustau – fils d’Axel Lousteau, un proche de Marine Le Pen – sont interpellés pour avoir roué de coups un jeune homme en raison de son homosexualité. Faits pour lesquels ils sont condamnés trois jours plus tard, le 12 juin.
Si ses membres sont régulièrement condamnés pour des injures à caractère raciste ou homophobe, l’organisation en elle-même a toujours échappé au juge administratif. Elle se met en sommeil en 2002, avant de faire un retour en grande pompe dans son université-berceau en 2010, puis de disparaître à nouveau des radars en 2017. Elle est finalement réactivée en 2022, ce qui pourrait bien permettre sa dissolution administrative.
Provocation à la discrimination ou à la haine
L’article L.212-1 du code de la sécurité intérieure laisse l’embarras du choix. Il prévoit que le Conseil des ministres peut dissoudre “toutes les associations ou groupements de fait” notamment lorsqu’ils contribuent à des “agissements à la discrimination, à la haine ou à la violence” des personnes en raison de leur ethnie, de leur religion ou de leur orientation sexuelle, ou “provoquent des manifestations armées ou à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens”. Cette deuxième hypothèse a par exemple permis à Gérald Darmanin de dissoudre par décret un autre mouvement d’extrême droite, Génération Identitaire, en mars 2021. Trois de ses membres avaient été condamnés en 2018 pour des actions menées contre les migrants à la frontière franco-italienne.
En janvier 2022, les Zouaves Paris, un groupuscule néonazi fondé en 2018 est lui aussi dissous, accusé d’être à l’origine d’agissements violents, de propager un discours “ouvertement raciste” et empreint de “l’idéologie nazie”. Même sentence pour l’association l’Alvarium, dissous le 17 novembre 2017 pour “appel à la violence et à la discrimination”.
Droit de contestation
La dissolution est toutefois loin d’être le fait du prince. Puisqu’elle porte atteinte à la liberté d’association, qui a une valeur constitutionnelle en vertu de la décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971, la décision doit être nécessaire à la sauvegarde de l’ordre public – un autre objectif de valeur constitutionnel (décision du 27 juillet 1982). Une association peut donc contester la décision devant le Conseil d’État, si elle estime que sa dissolution est disproportionnée au regard du trouble à l’ordre public dont elle est à l’origine.
Au cas par cas, le juge vérifie alors que la dissolution est adaptée, suffisamment proportionnée et nécessaire face aux agissements du groupement en cause. C’est sur la base de ce raisonnement qu’il a suspendu le décret de dissolution des Soulèvements de la Terre le 11 août dernier. Le Conseil d’État a estimé que le mouvement n’était pas directement responsable des violences commises contre des biens lors d’affrontements à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, en mars 2023. En revanche, il a validé la dissolution de Génération Identitaire, en expliquant que l’organisation propageait “une idéologie incitant à la haine et à la violence envers les étrangers et la religion musulmane”.
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