Au sommet mondial du fact-checking, Les Surligneurs s’allient aux vérificateurs de faits du monde entier pour défendre l’intégrité de l’information
Auteure : Nelly Pailleux, directrice des opérations
Les vérificateurs de faits du monde se réunissent pour la douzième édition de GlobalFact à Rio de Janeiro. Cette année, plus que jamais, le contexte mondial donne à l’événement un relief particulier.
Le Brésil, hôte de cette édition, incarne les tensions croissantes entre plateformes et autorités publiques : on se souvient de la décision de suspendre X dans le pays le 31 août 2024, notamment «au nom de la lutte contre la désinformation» ; décision de de la Cour suprême incarnée par Alexandre de Moraes. Il assure la keynote d’ouverture de cette conférence.
Par ailleurs, le 27 mai dernier, le bureau du procureur général du Brésil a déposé un recours devant la Cour suprême, demandant des mesures immédiates contre les plateformes numériques qui contribuent à la diffusion de la désinformation.
Tristes tropiques
Ces avancées législatives locales n’empêcheront pas les nombreux fact-checkers présents de se demander si ce sera leur dernière conférence de ce type : la fin du Third Party Fact-Checking de Meta, annoncée en janvier 2025 par Mark Zuckerberg, a été actée aux États-Unis. Les conséquences sont déjà bien réelles pour quantité d’acteurs présents, leur modèle économique dépendant fortement de leur partenariat avec Meta et/ou des financements américains. Bien que les boules de cristal de chacun n’aient jamais été aussi troubles quant à la suite de ce programme dans le reste du monde, il y a fort à parier qu’il y aura autant de scénarios discutés que de fact-checkers présents.
Le défi : s’I-Adapter
En attendant, trois thèmes semblent émerger lors de cette édition : l’impact, l’information en temps de crise (sécuritaire ou économique), et l’intelligence artificielle. L’impact à la fois des « faux récits sur le fact-checking » (qui commence généralement par l’apparemment innocente question « Mais qui factcheck les factcheckers ») et comment les contrer ; l’impact du fact-checking sur les croyances et la prolifération de la désinformation, et le rôle des impact editors dans les rédactions (nouveaux chief happiness officers ou corcovados de la vérité ?). Du monde entier, des témoignages viendront rappeler à quel point la question de l’impact et de la diffusion d’informations vérifiées est cruciale dans des autocraties, en temps de crise, et comment apprendre de ces situations pour être lus, écoutés, entendus, compris. Enfin, l’intelligence artificielle, -menace ou opportunité? sera présentée notamment sous l’angle de l’usage pour du monitoring de récits, de l’archive ou de la réponse automatisée.
Ne pas se laisser intimider – et continuer à faire front
À Rio, une ligne claire se dessine parmi les fact-checkers venus du monde entier : malgré les attaques, les remises en cause et les accusations de censure, il n’est pas question de battre en retraite. Se réunir ici, au Brésil, c’est refuser l’isolement, chercher ensemble des réponses, confronter les méthodes, et imaginer ce que pourrait être la vérification de demain. Les Surligneurs prennent part à cette réflexion collective, en venant présenter leur outil MARQUEUR, développé dans le cadre du projet LOI. Cet outil, à la croisée de l’intelligence artificielle et du droit international humanitaire, explore de nouvelles pistes face aux défis informationnels posés par les crises sécuritaires. Comme beaucoup ici, nous avançons avec des doutes, mais aussi avec la certitude que les solutions ne viendront que d’un travail commun — entre rédactions, continents et disciplines.
La rédaction n’a pas pris part à l’écriture de cet article.