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Attaque du commissariat de Champigny-sur-Marne : Gérald Darmanin veut « définir comme arme par destination les feux d’artifices et mortiers »

Création : 14 octobre 2020
Dernière modification : 20 juin 2022

Auteur : Pierre Fleury-Le Gros, maître de conférences en droit privé à la Faculté des affaires internationales du Havre, directeur du département de droit

Source : Le journal RTL de 5h, 12 octobre 2020

Tels qu’ils ont été utilisés à Champigny-sur-Marne, les mortiers d’artifice sont déjà considérés comme des « armes par destination » au sens du code pénal, sans qu’il y ait besoin de réécrire la loi. Et leur utilisation peut déjà être réprimée au titre de différents délits de violences aggravées.

Samedi 10 octobre, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’est exprimé à la suite de l’attaque du commissariat de Champigny-sur-Marne. Cette attaque a été réalisée au moyen, notamment, de mortiers d’artifice. Le ministre a alors exprimé son souhait de voir l’Assemblée nationale définir comme « arme par destination » les feux d’artifices et mortiers, ajoutant que ces engins « peuvent blesser, peuvent tuer », et qu’il faut « que nous les pénalisions ».

Si l’émotion devant la violence de l’agression et le danger représenté par ces engins est compréhensible, la réponse législative préconisée est en revanche inutile.

Dans l’état de la législation actuelle, le code pénal distingue deux catégories d’armes.

D’une part, l’arme par nature, définie par l’article 132-75 alinéa 1 du code pénal comme « tout objet conçu pour tuer ou blesser ».

D’autre part, l’arme par destination définie par l’article 132-75 alinéa 2. Ce second texte prévoit que « tout autre objet susceptible de présenter un danger pour les personnes est assimilé à une arme dès lors qu’il est utilisé pour tuer, blesser ou menacer ou qu’il est destiné, par celui qui en est porteur, à tuer, blesser ou menacer ».

L’intérêt de ce second texte est précisément de pouvoir qualifier d’arme tout objet qui ne remplit pas les conditions de la définition d’arme par nature ; le juge a d’ailleurs sur ce point eu l’occasion de se prononcer à maintes reprises, en qualifiant d’armes des objets aussi hétéroclites qu’insolites. La formule « tout autre objet » évite donc au législateur d’avoir à dresser une liste aussi fastidieuse qu’inutile des différents objets qui, détournés de leur destination normale, pourraient être « utilisés pour tuer, blesser ou menacer ».

Par conséquent, les mortiers d’artifice entrent déjà dans cette catégorie d’objets qui peuvent être détournés de leur destination normale pour être utilisés comme une arme. À n’en pas douter, ils remplissent les conditions de l’article 132-75 alinéa 2, puisqu’ils ont manifestement été utilisés dans le but de « tuer, blesser ou menacer » les forces de l’ordre repliées dans le commissariat. En d’autres termes, l’application de l’article 132-75 du code pénal au cas de Champigny-sur-Marne est conforme au principe de la légalité criminelle. La proposition consistant à légiférer pour qualifier ces mortiers d’arme par destination est inutile : les auteurs de ces agressions violentes peuvent déjà être poursuivis, a minima, sur le fondement de textes qui répriment les actes de violence, et érigent en circonstance aggravantes l’usage d’une arme.

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