Arrêté anti-moustiques de Machecoul-Saint-Même : Saint-Lumine-de-Coutais demande la suspension en référé
Dernière modification : 28 juillet 2022
Auteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay
Secrétariat de rédaction : Loïc Héreng et Yeni Daimallah
Source : Ouest France, 12 juillet 2022
Selon le maire de Saint-Lumine-de-Coutais, voisine de Machecoul-Saint-Même, l’arrêté anti-moustiques est manifestement illégal car non seulement il est flou, mais aussi parce que le maire d’une commune ne peut utiliser ses pouvoirs de police pour reporter une nuisance sur les communes voisines.
Rappelons les faits de ce qui promet d’être une saga de l’été : les orages suivis de périodes chaudes ont favorisé l’augmentation de la population de moustiques dans de nombreuses régions de France. Face aux nuisances et aux dangers potentiels de transmissions de certaines maladies, le maire de Machecoul-Saint-Même (Loire-Atlantique) a pris un arrêté de police “portant interdiction pour les moustiques de survoler la commune durant la soirée du 13 juillet”, publié sur le site de la mairie. S’il appartient bien au maire, usant de son pouvoir de police, de lutter contre certains fléaux menaçant la santé et la tranquillité, cette lutte ne peut justifier tous les moyens.
Agacé par l’absence de solidarité de la part de son homologue, le maire de Saint-Lumine-de-Coutais en appelle au préfet pour qu’il prenne des mesures à l’échelle du département et demande au tribunal administratif de Nantes de suspendre en urgence en référé l’arrêté en question.
Un arrêté qui reporte les nuisances sur les communes voisines
Selon le maire de Saint-Lumine-de-Coutais, l’arrêté est manifestement illégal : le maire d’une commune ne peut utiliser ses pouvoirs de police pour reporter une nuisance sur les communes voisines. Or en interdisant aux moustiques le survol de sa commune, le maire de Machecoul-Saint-Même, loin de supprimer la menace, la déplace vers les autres communes.
Pour cette raison, le maire de Saint-Lumine-de-Coutais estime que la police anti-moustique, sauf à ordonner des mesures d’éradication supprimant la menace sanitaire, ne peut se borner à édicter des mesures d’interdiction pure et simple de survol d’une commune. En raison de la nature même du danger sanitaire causé par les moustiques, seule une mesure à l’échelle départementale voire nationale peut être prise.
Un arrêté trop flou
Le maire de Saint-Lumine-de-Coutais ajoute que l’arrêté en cause est très imprécis. En effet, son article 1er prévoit : “La commune de Machecoul-Saint-Même, et notamment le périmètre du Parc de Loisirs de Saint-Même, est interdit de survol par les moustiques (en particulier les types Aedes, Anophèles et Culex)”. Or, cette formule comporte une contradiction interne : est-ce la commune qui est interdite de survol, et dans ce cas pourquoi mentionner le parc de loisirs ? L’imprécision des arrêtés de police constitue une cause d’illégalité, car les citoyens concernés sont sanctionnés en cas de non-respect. Or, comment un citoyen peut-il respecter un arrêté incohérent ? Il en va du principe de légalité des peines et des délits.
De plus, cet arrêté interdit le survol “dans la soirée” du 13 juillet ? Quand commence une soirée ? Avec les happy hours, on ne sait plus ! Or toute interdiction doit spécifier les horaires, lieux et modalités précisément. Sachant de plus que les moustiques attaquent en général la nuit, qui ne tombe en cette période que vers 22 heures, il y a disproportion.
Enfin, le maire de Saint-Lumine-de-Coutais ajoute devant le tribunal administratif qu’il y a urgence, car il organise également un bal du 13 juillet. Il espère que le tribunal pourra statuer à temps et suspendre l’arrêté litigieux.
Le tribunal devrait statuer dans les heures qui viennent. La bataille du moustique ne fait que commencer.
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