Affaire Norman Thavaud : “le classement sans suite n’est pas synonyme d’innocence”
Dernière modification : 15 août 2024
Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public
Relecteur : Jean-Baptiste Thierry, professeur de droit privé à l’Université de Lorraine
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Source : Compte X d'un utilisateur, 11 août 2024
Un classement sans suite est prononcé par le procureur de la République s’il estime ne pas avoir assez d’éléments pour demander un jugement. L’auteur présumé est innocent jusqu’à ce qu’un tribunal le condamne définitivement.
Après un long silence, le vidéaste et humoriste Norman Thavaud a publié une vidéo publiée sur sa chaîne YouTube dans laquelle il revient sur une affaire le concernant. Accusé de viol et de détournement de mineurs en 2022 par plusieurs femmes, l’enquête a été classée sans suite par le parquet de Paris en octobre 2023. La vidéo, dans laquelle Norman Thavaud s’exprime pour la première sur son vécu de l’affaire et rappelle être innocent, a été très virale. Certains internautes affirment qu’un classement sans suite n’équivaut pas à être innocenté. Mais en droit, sauf cas particuliers, on est innocent jusqu’à la condamnation définitive prononcée par un juge.
Le classement sans suite, qu’est-ce que c’est ?
Prévu aux articles 40 et 40-1 du code de procédure pénale, le classement sans suite est la décision par laquelle le procureur de la République décide de ne pas poursuivre, c’est-à-dire de ne pas saisir un juge pour qu’un procès ait lieu. L’enquête préliminaire est menée à charge et à décharge, seront donc recherchées à la fois les preuves d’innocence et de culpabilité. Les motifs de classement sans suite sont variés : irrégularité de la procédure, impossibilité d’identifier l’auteur, absence d’infraction, infraction pas suffisamment caractérisée. Dans le cas de Norman Thavaud, c’est ce dernier motif que le parquet a indiqué.
Présumé innocent jusqu’à la condamnation par un juge
L’affaire étant classée, le procureur ne va pas poursuivre le vidéaste et le juge n’aura pas à se prononcer sur son innocence ou sa culpabilité. Dès lors, il est présumé innocent. La présomption d’innocence est garantie par l’article 9 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme, et depuis 2000 à l’article préliminaire du code de procédure pénale. Ce principe est un pilier fondamental de toute société démocratique, empêchant toute dérive arbitraire d’une accusation qui vaudrait condamnation.
Une affaire encore à suivre
Le classement sans suite n’empêche pas la tenue d’un procès pour autant. Si le procureur classe l’affaire, il peut revenir sur sa décision si de nouveaux éléments sont portés à sa connaissance. Les plaignants peuvent aussi se constituer partie civile (Norman Thavaud l’a d’ailleurs annoncé dans sa vidéo) et saisir directement le juge d’instruction qui dirigera les investigations qui établira les faits et l’existence ou non d’une infraction. Si l’information est concluante, le juge d’instruction peut demander à ce que l’auteur présumé soit jugé par le tribunal. C’est à ce moment qu’un tribunal peut déclarer l’auteur coupable, mettant fin à sa présomption d’innocence.
À noter que si un tribunal condamnait Norman Thavaud, et que ce dernier faisait appel de cette condamnation, il suspend la première décision et resterait présumé innocent jusqu’à la condamnation définitive, sans appel possible.
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