Crédits photo : Anh De France, CC 2.0

Éric Zemmour critique sans nuance la destruction des services publics : “La Commission européenne par idéologie obsessionnelle de la concurrence qu’elle met partout a obligé les gouvernements […] à faire de la concurrence”

Création : 26 février 2018
Dernière modification : 17 juin 2022

Auteur : Vincent Couronne

Source : Éric Zemmour, RTL, 16 févr. 2018

Ce n’est pas la Commission européenne qui impose de « faire de la concurrence » dans les services publics, la France s’aligne sur une politique qu’elle a elle-même contribué à élaborer, et il n’y a rien d’obsessionnel dans l’application des règles de concurrence : des dérogations permettent aux États membres de maintenir des services publics.

Non seulement ce n’est pas la Commission qui fait preuve d’ « idéologie obsessionnelle » à l’encontre des services publics, mais le droit de l’Union européenne en assure une protection, surtout depuis le traité de Lisbonne en 2007.

D’abord, ce n’est pas la Commission qui est responsable de cette « idéologie obsessionnelle », mais les États membres, rédacteurs des traités. Ils ont prévu que les entreprises publiques ou celles qui disposent de droits spéciaux ou exclusifs (par exemple des monopoles) sont soumises aux règles de concurrence. Ils ont ensuite chargé la Commission (art. 106 § 3 TFUE) d’en assurer le respect. La Commission ne fait donc que respecter le droit tel qu’il a été voulu par les États membres. Éric Zemmour commençait sa chronique par une maxime : « quand le sage montre la lune l’imbécile regarde le doigt ». Il ne savait pas si bien dire.

Ensuite, il est vrai que nombre de services publics ont été soumis aux règles de concurrence, toujours pour assurer le respect des traités, et donc la volonté des États membres. Les services « en réseaux » (services postaux, transports ferroviaires, télécommunications, énergie) ont été particulièrement touchés. Là encore, c’est à la demande des États membres. Cependant, la Cour de justice autorise des restrictions à la concurrence pour permettre « à une entreprise investie d’une mission d’intérêt général d’accomplir celle-ci ». Elle admet aussi que l’État puisse financer des services publics sans que cela viole les traités.

Enfin, le droit de l’Union ne remet pas en cause ce qu’on appelle en France les services publics administratifs, qui demeurent de la compétence des États (armée, justice, éducation, culture…). De même, une dérogation est prévue pour ce qu’on appelle les services d’intérêt économique général (art. 106 § 2 TFUE), dérogation renforcée par le traité de Lisbonne en 2007 grâce à l’ajout de dispositions protégeant spécifiquement ces services d’intérêt général (art. 14 TFUE, et Protocole n° 26). Pour faire simple, l’accomplissement d’un service public peut prévaloir sur les règles de concurrence et les libertés de circulation. Il n’est pas anodin que ces clarifications aient été faites à la demande de la France et des Pays-Bas, deux États dans lesquels le projet de Constitution pour l’Europe avait été rejeté en 2005, craignant – entre autres choses – un affaiblissement des services publics par l’application des règles de concurrence.

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