Selon Jean-Luc Mélenchon, la Pologne n’est pas soumise à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
Dernière modification : 20 juin 2022
Autrice : Anne Clémence Drouant, étudiante en LLM au Collège d’Europe, sous la direction de Tania Racho, docteure en droit public (Université Panthéon-Assas)
Source : Intervention à l’Assemblée nationale, 19 mai 2020 (4’50)
Selon Jean-Luc Mélenchon, « la Pologne ne participe pas à la Charte des droits fondamentaux » de l’Union européenne. C’est faux : la Pologne a tenu à préciser certaines modalités d’application de la Charte dans un protocole sans que cela rende la Charte inapplicable.
Selon Jean-Luc Mélenchon, intervenant à l’Assemblée nationale ce mardi 19 mai 2020 en tant que président du groupe « La France insoumise », « La Pologne ne participe pas à la Charte des droits fondamentaux » de l’Union européenne. Une telle affirmation est fausse, en ce qu’elle revient à dire que la Pologne n’est pas soumise aux droits fondamentaux de la Charte. S’il est vrai qu’il existe un Protocole précisant les modalités d’application de la Charte à la Pologne, au Royaume-Uni et à la République Tchèque, ce dernier ne les exonère pas du respect des droits fondamentaux protégés par l’Union européenne.
La Charte des droits fondamentaux est un texte permettant le respect des droits fondamentaux par les institutions de l’Union et par les États membres lorsqu’ils appliquent le droit de l’Union. Au moment de son adoption, un protocole a été annexé au Traité sur l’application de la Charte à la Pologne et au Royaume-Uni, également applicable à la République Tchèque. Comme son nom l’indique, il précise l’application de la Charte pour ces trois pays.
La Pologne a fait ajouter ce protocole pour prévenir une éventuelle intrusion de la Charte dans son droit national, comme une garantie superflue car le champ d’application du texte est déjà limité.
Ce protocole précise que la Charte ne crée pas pour la Cour de justice de l’Union de nouvelles compétences en matière de droits fondamentaux à l’égard de la Pologne.
Ces précisions dans le protocole ne changent rien en réalité à l’application et au respect de la Charte. Celle-ci doit être prise en compte par les institutions de l’Union quand elles adoptent un texte et par les États quand ils appliquent le droit de l’Union. Rien ne les oblige à respecter la Charte dans des situations purement nationales, ce que craignait la Pologne.
Le protocole le dit d’ailleurs, il existe pour « dissiper tout doute ». Il a donc peu d’intérêt, et il est le fruit d’une inquiétude politique par rapport aux effets juridiques des droits sociaux. Il n’a d’ailleurs pas empêché la Cour de justice de considérer en juin et novembre 2019 que la réforme polonaise modifiant l’âge de départ à la retraite des juges polonais et subordonnant la poursuite des activités de magistrat à une autorisation gouvernementale était contraire au principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail et au principe de la protection juridictionnelle effective.
Il est donc faux d’affirmer que la Pologne ne participe pas à la Charte des droits fondamentaux car cela revient à insinuer qu’elle n’est pas soumise à son respect.
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