Non, EDF n’a pas été rachetée par un proche de Volodymyr Zelensky
Auteur : Etienne Merle, journaliste
Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Etienne Merle, journaliste
Source : Compte Facebook, le 2 août 2025
Un reportage, attribué à France 2, circule sur les réseaux sociaux en affirmant qu’un ministre ukrainien aurait racheté EDF pour un euro symbolique. Or, ni le format du reportage ni les prétendues révélations qu’il contient ne tiennent la route.
Depuis 2022, le président ukrainien Volodymyr Zelensky est régulièrement visé par des campagnes de désinformation. Fin juillet 2025, une nouvelle rumeur a circulé sur les réseaux sociaux : EDF aurait été vendue à un ministre ukrainien pour un euro symbolique, afin que « le peuple français soutienne directement l’Ukraine ».
En réalité, EDF demeure intégralement détenue par l’État français. Ni l’entreprise publique ni Oleskiï Tchernychov, le vice premier ministre ukrainien cité, n’ont conclu d’accord de vente. L’article et la vidéo présentés comme preuves usurpent l’identité de France Télévisions et montrent des signes d’utilisation de l’intelligence artificielle.
La rumeur affirme également qu’une hausse de la TVA sur l’électricité, de 5,5 % à 20 % au 1er août, servirait à financer l’Ukraine. Si cette augmentation est réelle, elle découle d’une décision nationale visant à harmoniser les taux de TVA, sans lien avec un quelconque soutien financier à Kiev.
Un étrange nom de domaine
Pour s’apercevoir de la supercherie, il faut tout d’abord regarder attentivement le nom de domaine du site sur lequel renvoie l’article relayé en ligne : « tvfrance2.fr ». Cette adresse Internet, aujourd’hui inaccessible, n’est pas le nom de domaine du groupe France Télévisions (« france.tv »). Quant aux archives officielles du JT, elles ne contiennent aucune mention d’une vente d’EDF.
Une vidéo suspecte et des « preuves » sans valeur
En plus de l’article, une vidéo d’un « reportage » de France 2 est également relayée. Mais elle porte des signes d’une fabrication par intelligence artificielle : voix mécaniques, synchronisation approximative entre les lèvres et le son, et les mouvements du « journaliste » sont « saccadés ».
Les « documents internes » censés attester la transaction ne sont pas plus crédibles. L’un d’eux reprend à l’identique les statuts d’EDF, en y ajoutant une phrase indiquant que « 51 % du capital » appartiendrait désormais à une société d’investissement supposément liée à Oleskiï Tchernychov.
Or, les statuts officiels sont consultables librement sur le site d’EDF, sans cette mention. Et surtout, une telle cession nécessiterait une modification législative, car l’article L111-67 du code de l’énergie dispose que « l’entreprise dénommée ‘Électricité de France’ est une société anonyme d’intérêt national, dont le capital est détenu à 100 % par l’État. » Vérification faite, ni le Journal officiel, ni les sites de l’Assemblée nationale et du Sénat ne font mention d’une telle loi, ni même d’un simple projet.
Enfin, un rachat d’EDF — à fortiori pour un euro symbolique — aurait immanquablement fait la une des journaux et encore plus si un journal télévisé d’envergure comme celui de France 2 en avait fait écho. Or, aucune source sérieuse n’en fait état. EDF et Oleskiï Tchernychov ont d’ailleurs tous deux démenti ces accusations auprès de l’AFP, qui a également enquêté et confirmé l’absence de fondement de cette rumeur.
Une hausse de TVA… pour d’autres raisons
Pour autant, l’infox reprend un élément bien réel, mais mal interprété : la hausse de TVA sur l’électricité mise en place le 1er août 2025. Cette mesure existe mais n’a rien à voir avec l’Ukraine. Décidée dans la loi de finances 2025, elle vise à harmoniser les taux de TVA conformément au droit européen.
Comme l’ont déjà raconté Les Surligneurs, jusqu’ici, la part fixe de l’abonnement était taxée à 5,5 % et la consommation à 20 %. Or, depuis 2018, Bruxelles impose désormais un taux unique pour un même service. Si la France a choisi 20 %, elle aurait pu opter pour un taux inférieur, tant qu’il était uniforme.