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Crédit : Touam (Hervé Agnoux) - CC BY-SA 4.0

Le code de justice administrative n’a-t-il aucune base légale ?

Création : 17 juillet 2025

Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public à l’Université de Poitiers

Relecteur : Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public à l’Université de Poitiers

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Clarisse Le Naour, double cursus L3 science politique et L3 droit public à l’université Lumière Lyon II

Source : Compte Facebook, 13 juillet 2025

Un post viral affirme que le code de justice administrative serait illégal, car l’ordonnance qui l’a créée en 2000 n’a jamais été ratifiée par le Parlement. En réalité, cette affirmation repose sur une mauvaise compréhension de la Constitution. Le Conseil constitutionnel a confirmé que de telles ordonnances peuvent tout à fait avoir valeur législative, même sans ratification.

Dans un post, un internaute affirme que le code de justice administrative (CJA) ne serait pas légal, car l’ordonnance qui l’a instituée en 2000 n’a jamais été ratifiée par le Parlement. Cette affirmation est juridiquement infondée. Explications.

Une ordonnance prise sur le fondement de l’article 38 de la Constitution

Le code de justice administrative a été créé par une ordonnance du 4 mai 2000, prise en application de l’article 38 de la Constitution. Cet article permet au gouvernement, lorsqu’il y est autorisé par le Parlement via une loi d’habilitation, de prendre des mesures relevant normalement du domaine de la loi. Ces mesures prennent la forme d’ordonnances, qui doivent en principe être ratifiées par le Parlement pour acquérir valeur législative.

Or dans le cas du CJA, l’ordonnance du 4 mai 2000 n’a jamais été expressément ratifiée par une loi ultérieure. Faut-il en déduire que ce code serait illégal ? La réponse est non.

Une valeur législative même sans ratification

L’erreur repose sur une interprétation incomplète de l’article 38. Il est vrai qu’une ordonnance prise dans ce cadre n’a pas valeur de loi tant que le Parlement n’a pas adopté une loi pour la ratifier dans un délai de deux mois.

Mais une fois ce délai expiré, et si l’ordonnance a bien été prise dans le respect de la loi d’habilitation, elle peut tout à fait recevoir une application juridique durable.

C’est ce qu’a confirmé le Conseil constitutionnel dans une décision du 28 mai 2020. Le juge constitutionnel a admis que les ordonnances non ratifiées « doivent être regardées comme des dispositions législatives » à l’expiration du délai d’habilitation, à condition qu’elles aient bien été prises dans le cadre fixé par la loi d’habilitation.

L’institution de la rue Montpensier s’est appuyée sur la dernière phrase de l’article 38 qui prévoit qu’« à l’expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif ».

Concrètement, cela signifie que les dispositions du Code de justice administrative sont valides et peuvent être invoquées devant les juridictions, même sans ratification formelle.