Non, Emmanuel Macron n’a pas tenté de bloquer une procédure de destitution
Auteur : Nicolas Turcev, journaliste
Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Clara Robert-Motta, journaliste
Source : Chaîne Youtube, le 30 juin 2025
Une vidéo virale prétend que le président de la République serait intervenu pour empêcher les députés de le renverser. Aucune procédure de destitution n’est actuellement examinée par l’Assemblée nationale.
Emmanuel Macron en pleine cabale contre les députés qui souhaiteraient le renverser. C’est le scénario relaté, le 30 juin, dans une vidéo virale qui prétend que le président de la République manœuvrerait pour « bloquer sa destitution ».
« Macron […] punit les députés qui ont tenté de le faire tomber », assure la voix off, qui explique que « le chef de l’État a […] verrouillé l’Assemblée », alors « qu’un groupe de députés s’apprêtait à engager une procédure de destitution ».
Outre le fait qu’on ne trouve aucune trace dans la presse de cette information majeure, le récit ne tient pas la route. Pour une raison simple : aucune procédure de destitution n’est actuellement engagée contre le président de la République.
La procédure fantôme
Pour amorcer le processus de destitution prévu à l’article 68 de la Constitution, il faut qu’un dixième des membres de l’Assemblée (ou du Sénat) dépose une proposition de réunion du Parlement en Haute Cour. C’est ce qu’avait entrepris La France insoumise en août 2024, alors que le pays s’enlisait dans la crise post-législatives anticipées.
Les députés de gauche étaient parvenus à franchir la première étape du parcours : la validation du texte par le bureau de l’Assemblée nationale, qui doit juger de sa recevabilité selon une loi de 2014 qui encadre le recours à l’article 68. Mais les parlementaires s’étaient ensuite heurtés au double rejet de leur résolution par la commission des lois puis, surtout, par la conférence des présidents qui a refusé d’inscrire le texte à l’ordre du jour de l’hémicycle, sifflant la fin des hostilités.
Une seconde tentative, toujours à l’initiative insoumise, avait également été initiée en novembre 2024. Le bureau de l’Assemblée avait acté sa recevabilité, mais le président de la commission des lois avait refusé son examen en commission. Depuis, aucun groupe politique n’a renouvelé l’expérience.
Ainsi, si une procédure de destitution était actuellement en cours, une trace de son examen par l’un de ces organes devrait apparaître sur le site de l’Assemblée nationale. Or, aucun des agendas de la commission des lois, de la conférence des présidents, ni de l’hémicycle ne fait mention d’une procédure de destitution. Le service de communication de l’Assemblée nationale confirme aux Surligneurs qu’« aucune procédure de destitution du président de la République n’est actuellement en examen à l’Assemblée nationale ».
En revanche, une pétition demandant la destitution d’Emmanuel Macron a été déposée sur le site de l’Assemblée nationale le 28 avril 2025. Le texte, qui a recueilli plus de 50 000 signatures, pourra être débattu en séance publique seulement s’il franchit le seuil des 500 000 sponsors. Autrement dit, le renversement d’Emmanuel Macron n’est pas encore à l’ordre du jour.
Une chaîne Youtube de fake news boostée à l’IA
Derrière la viralité de cette fausse information se trouve un compte Youtube, actif depuis moins d’un mois, et qui a, depuis, publié près de 70 vidéos – à raison de trois ou quatre par jour. Les contenus sont réalisés de façon similaire : une voix – très probablement générée par intelligence artificielle au vu de la diction – relate des informations jamais sourcées alors que des images de personnalités politiques – parfois réelles, parfois générées par IA – défilent. Les miniatures utilisent un titre racoleur et des citations inventées que les vidéos ne reprennent jamais.

Capture d’écran des vidéos publiées de la chaîne Youtube France Politique Directe.
La vidéo en question a engrangé, neuf jours après sa publication, près de 240 000 vues. Il faut dire qu’elle a été repartagée dans des réseaux de blogs comme profession-gendarme, site tenu par un gendarme retraité proche de la complosphère « et de l’extrême-droite » ainsique Réseau international qui fait partie des « sites les plus fréquentés de la complosphère », selon Conspiracy Watch.