Que risque le secrétaire général de la Coordination rurale après ses menaces contre l’Office de la biodiversité ?
Auteur : Artur Porossian, étudiant en Master 1 droit pénal à l’Université de Lorraine
Relecteurs : Jean-Baptiste Thierry, professeur de droit pénal, université de Lorraine
Etienne Merle, journaliste
Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun
Secrétariat de rédaction : Etienne Merle, journaliste
Source : Le Monde, le 21 janvier 2025
Le secrétaire général de la Coordination rurale a appelé à “brûler les voitures” de l’Office français de la biodiversité (OFB) qui se présenterait dans un champ. L’agriculteur a promis que les agents seraient épargnés. Des propos qui font, bien évidemment, courir un risque pénal.
L’Office français de la biodiversité (OFB), la fameuse police de l’environnement mène depuis le vendredi 31 janvier 2025 une grève en raison des désaccords l’opposant à des agriculteurs et même au gouvernement.
La raison principale des tensions ? Le port d’arme des agents de l’OFB lors des contrôles des exploitations agricoles, que le Premier ministre François Bayrou avait qualifié de « faute » lors de discours de politique générale du 14 janvier 2025.
Les agriculteurs ne souhaitant plus voir les agents de l’OFB sur leurs exploitations, Benoît Pradal, du syndicat national des personnels de l’environnement Force ouvrière (SNAPE-FO, voix syndicaliste de l’OFB) a comparé sur France Inter cette situation à celle des dealers demandant « aux policiers de ne plus venir dans les cités ». Propos pour lesquels il s’est ensuite excusé.
Malgré ces excuses, le secrétaire général du syndicat agricole Coordination rurale, Christian Convers, syndicat agricole français classé politiquement à la droite (et parfois assimilé à l’extrême droite), a répondu qu’ « une voiture de l’OFB qui entre dans une exploitation sera brûlée sur place » mais que, bien évidemment, « les personnes seront épargnées« . « On a été assimilés à des dealeurs. Des dealeurs dans une zone de non-droit, ça brûle […] Il n’y aura pas de pitié », a-t-il déclaré, selon des propos rapportés par le journal Le Monde.
Un accueil « chaleureux » mais pénalement répréhensible
Juridiquement, incendier une voiture de l’OFB correspond à une destruction, dégradation ou détérioration volontaire d’un bien prévue et réprimée par l’article 322-6 du Code pénal.
Cette infraction prévoit des procédés largement entendus comme un incendie, une explosion ou bien tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes. Peu importe qu’une personne soit blessée. L’infraction consiste à employer un moyen « de nature à créer un danger ».
Surtout, l’article 322-8 du même code aggrave les peines encourues lorsque l’infraction est commise du fait de la qualité de personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, ce que sont bien les agents de l’OFB. Les peines encourues sont alors de vingt ans de réclusion criminelle et 150 000 euros d’amende.
Ces propos pourraient même constituer des menaces qui seraient pénalement punissables. En effet, les articles 322-12 et suivants du code pénal punissent la menace de commettre une destruction, une dégradation ou une détérioration dangereuse pour les personnes.