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Groupe parlementaire "The Left" au Parlement européen, CC BY 2.0

Jean-Luc Mélenchon peut-il refuser de se présenter devant une commission d’enquête ?

Création : 1 décembre 2025

Auteur : Guillaume Baticle, journaliste, doctorant en droit public à l’Université de Poitiers

Relecteur : Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public à l’Université de Poitiers

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction : Guillaume Baticle, journaliste, doctorant en droit public à l’Université de Poitiers

Source : Dimanche en Politique, France 3, 30 novembre 2025

Jean-Luc Mélenchon doit être auditionné ce mardi 2 décembre par la commission d’enquête sur les liens entre politique et islamisme, mais La France insoumise appelle à boycotter ses travaux, qu’elle juge irréguliers. Reste que le droit est clair : une convocation devant une commission d’enquête est obligatoire, sous peine de sanctions pénales.

Jean-Luc Mélenchon va-t-il bouder les députés ? Le fondateur de la France Insoumise a été convoqué par la commission d’enquête sur les liens entre la politique et l’islamisme. Il doit être auditionné ce mardi 2 décembre.

Mais le chef de file des Insoumis, Manuel Bompard, a annoncé dimanche 30 novembre que les membres de son mouvement ne devaient pas répondre aux invitations de cette commission. Il considère « que cette commission d’enquête ne respecte pas les règles et donc ce n’est pas une commission d’enquête ».

Que dit le droit sur ce point ? Les insoumis doivent-ils se rendre devant cette commission s’ils y sont convoqués ?

Une commission critiquée mais qui existe

Manuel Bompard ne semble pas reconnaitre l’existence de cette commission car elle ne respecterait pas « les règles”. Mais de quelles règles parle-t-il ?

Le règlement de l’Assemblée nationale, qui organise le fonctionnement des commissions d’enquête, prévoit que la composition du bureau de la commission d’enquête doit « s’efforcer de reproduire la configuration politique de l’Assemblée et d’assurer la représentation de toutes ses composantes ».

Le terme « s’efforcer » est ici à interpréter de sorte que ce soit plus une obligation de moyen que de résultat. Si tout a été tenté pour que les forces politiques soient représentées au sein du bureau, c’est suffisant pour que l’obligation soit remplie.

Et c’est en s’appuyant sur ce point que Manuel Bompard fustige l’absence de députés de gauche, tout groupe confondu, au sein du bureau de la commission. Pour autant, la commission d’enquête a été déclarée recevable par la commission des lois.

Quelles conséquences si Jean-Luc Mélenchon ne s’y rend pas ?

Que les Insoumis ne reconnaissent pas la légitimité de la commission ne change rien au caractère obligatoire d’une convocation devant elle. Selon l’article 6 d’une ordonnance de 1958, « toute personne dont une commission d’enquête juge l’audition utile est tenue de déférer à la convocation qui lui est délivrée », sous peine de sanctions pénales pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende.

À défaut de s’y présenter, le président de la commission peut saisir la justice. C’est ce qu’avait fait Éric Coquerel. Le député LFI, alors président de la commission d’enquête sur le dérapage budgétaire, a tenté de sanctionner Alexis Kohler, l’ancien secrétaire général de l’Élysée, qui avait séché la commission.

Mais en l’occurrence, le parquet de Paris a classé l’affaire sans suite, « au visa de la séparation des pouvoirs ». Alexis Kohler était ainsi considéré comme une extension du président de la République, que le Parlement ne peut pas contrôler.

Ce ne sera pas le cas de Jean-Luc Mélenchon qui n’est aujourd’hui qu’un citoyen comme les autres et qui doit, en tout état de cause, répondre à sa convocation.

 

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