Emmanuel Macron a-t-il débloqué une aide de 1,5 milliard d’euros pour la région des Grands Lacs en Afrique ?
Autrice : Maylis Ygrand, journaliste
Relecteur : Etienne Merle, journaliste
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Secrétariat de rédaction : Maylis Ygrand, journaliste
Source : Compte Facebook, le 2 novembre 2025
Selon certains internautes, le président de la République aurait annoncé verser une aide de 1,5 milliard d’euros pour la région des Grands Lacs en Afrique. Cette aide est en réalité internationale et n’est pas entièrement financée par la France.
« Enlevez-lui le chéquier ! », s’insurge Sarah Knafo. Le 31 octobre dernier, l’eurodéputée Reconquête ! réagissait sur X à un article de BFM TV concernant l’annonce de la France d’une « aide internationale de plus d’1,5 milliard d’euros pour les Grands Lacs ». Cette région d’Afrique, qui regroupe Le Burundi, la République démocratique du Congo, le Rwanda et l’Ouganda, traverse une grave crise humanitaire.
Pour le Huffington Post, Sarah Knafo est prise « en flagrant délit de fake news ». Selon le média, l’eurodéputée sous-entend certainement que l’aide serait entièrement financée par la France. Or, cette aide est internationale. Accusée de désinformation, l’eurodéputée nie ensuite sur X avoir affirmé que l’aide était seulement française.
Si son post est ambigu, d’autres publications sur les réseaux sociaux ne le sont pas. « Alors que des millions de Français n’arrivent plus à vivre dignement, Macron débloque 1,5 milliard d’euros pour la région des Grands Lacs en Afrique », tacle ainsi un internaute. Quelques précisions semblent donc nécessaires.
Une aide internationale
Le 30 octobre dernier, avait lieu, à Paris, la conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans les Grands Lacs. Soixante-dix États et organisations internationales et une quarantaine d’ONG étaient réunis afin de récolter de l’argent pour lutter contre la crise humanitaire en cours dans la région africaine des Grands Lacs.
En conclusion de la journée, Emmanuel Macron a annoncé une aide de « plus de 1,5 milliard d’euros d’assistance pour les populations les plus vulnérables ». « Ce seront des médicaments, de l’alimentation, mais aussi […] des capacités redonnées aux populations de rebâtir leur quotidien, de retrouver leur autonomie alimentaire et économique, de pouvoir retrouver une activité qui stabilise ce qui est le cœur même du travail des humanitaires », détaille le président de la République.
Mais, précise-t-il, cette dernière a été « collectivement mobilisé[e] ». Il ne s’agit donc pas là d’une aide purement française, mais internationale. En l’occurrence, l’engagement financier s’élèvera pour l’Union européenne et ses États membres à 900 millions d’euros.
De plus, d’après RFI, qui s’appuie sur des sources anonymes situées dans la région, « sur le montant d’1,5 milliard d’euros, 500 millions avaient déjà été engagés cette année, et une partie correspond à des promesses anciennes, réaffirmées à l’occasion de la conférence ».
Sollicités par la rédaction, le ministère des Affaires étrangères et l’Élysée n’avaient pas encore répondu sur la participation exacte de la France dans cette aide de 1,5 milliard, lors de la publication de cet article. Néanmoins, au vu des chiffres énoncés, la thèse d’une participation purement française s’effondre.
Un besoin de 2,54 milliards de dollars
Cette promesse intervient alors que la situation devient de plus en plus dramatique dans la région des Grands Lacs. Depuis début janvier et la prise des villes congolaises de Goma et Bukavu par le groupe armé M23, la crise humanitaire se détériore.
Emmanuel Macron faisait ainsi état de « chiffres insoutenables ». Ce sont « un million de nouveaux déplacés depuis le début de l’année, parmi six millions d’êtres déjà déracinés, des centaines de milliers de réfugiés en République démocratique du Congo et dans les pays voisins qui aspirent à revenir dans leur foyer, près de 28 millions de personnes en insécurité alimentaire, une femme violée toutes les quatre minutes et un enfant toutes les 30 minutes ».
Avant la dernière escalade, l’ONU et ses partenaires humanitaires avaient estimé avoir besoin de 2,54 milliards de dollars « pour fournir une aide vitale à 11 millions de personnes en 2025 ». Sauf qu’avant la conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans les Grands Lacs, l’aide n’avait été financée, selon Emmanuel Macron, qu’à « seulement 16 % ». L’aide d’1,5 milliard annoncée le 30 octobre dernier viendra donc pallier une partie du manque.
Alors que l’agence des États-Unis pour le développement international (Usaid) a officiellement fermé en juillet dernier, le manque d’aide humanitaire se fait cruellement sentir. En effet, l’agence était notamment un acteur important contre l’insécurité alimentaire en République démocratique du Congo.
Plus largement, en 2024, selon les Nations unies, les États-Unis ont couvert 70 % du financement du plan de réponse humanitaire en RDC. Sur le terrain, les conséquences de l’important retrait états-unien de l’aide humanitaire sont déjà visibles. Et la situation humanitaire ne cesse, elle, de s’aggraver.
