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Crédit : Kevin Schneider

L’article 61 de la Constitution permet-il ne pas payer d’impôts ?

Création : 31 janvier 2025

Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public, université de Poitiers

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, université Paris-Saclay

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Source : Compte Facebook, 21 novembre 2024

Scoop : nous sommes tous dispensés de payer l’impôt, car on ne peut on être emprisonné pour dettes selon la Constitution… Congolaise.

Décidément, on peut dire — et croire ? — n’importe quoi pour justifier de ne pas vouloir payer d’impôts. Un internaute, apparenté au groupe « Fraude du nom légal » qui dénonce l’illégalité de notre système juridique, partage régulièrement ses « démonstrations juridiques »

Si la mouvance « Fraude du nom légal » est présente tout autour du globe, cet internaute a pour habitude d’écrire au sujet de la France. Son public le suit donc en quête de nouvelles stratégies pour esquiver la contribution publique. Cette fois, il invoque la Constitution pour se protéger de l’obligation de payer ses factures.

En l’occurrence, il invoque l’article 61 de la Constitution qui interdit selon lui « l’emprisonnement pour dettes ». Tout étudiant en droit de première année, et même de premier semestre, se réfère immédiatement à la source, à savoir cet article 61 avec un doute… mais oui, c’est bien ça : l’article 61 traite du Conseil constitutionnel et pas des dettes…  Mystère.

Rapide recherche sur internet : la capture d’écran présentée sur le post est celle de l’article 61 de la Constitution de la République démocratique du Congo  !

Donc avis aux lecteurs assidus du stratège fiscal de « Fraude du nom légal » : présentez-vous à votre centre des impôts, dites bien qu’en vertu de la Constitution congolaise, vous êtes dispensés d’impôts : on ne rigole pas souvent dans l’administration fiscale, cela les distraira.

Mais à la réflexion, il n’y a pas de quoi rire face à ce type de messages qui désarçonnent le juriste, mais aussi le lecteur doté d’un minimum de bon sens qui se dit que certains vont le croire…

Ajoutons pour être complets que l’emprisonnement pour dette est une pratique non pas fiscale, mais entre personnes privées : sous les Romains, celui qui n’arrivait pas à payer ses dettes pouvait être emprisonné dans la maison de son créancier…