Capture d'écran Thread

Attention à cette fausse statistique ethnique publiée sur les réseaux sociaux

Création : 7 août 2024

Auteur : Etienne Merle, journaliste

Relectrice : Clara Robert-Motta, journaliste

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétaire de rédaction : Etienne Merle, journaliste

Source : Compte Thread, le 4 août 2024

Un internaute a publié un douteux montage statistique sur les réseaux sociaux censé montrer la part de “noirs” et “d’Arabes” vivants en France. Ces chiffres ne reposent sur rien si ce n’est une vision racialiste de la société.

Pas de trêve pour la désinformation pendant les Jeux olympiques. Sur le réseau social Threads, un internaute publie une photo composée d’une centaine d’émojis (des petites images destinées aux messages électroniques qui représentent des émotions ou des actions) censée montrer la part “de noirs” et “d’Arabes” vivant en France.

Sur la photo, 100 visages d’hommes sont représentés. Quatre-vingt-quatre d’entre eux semblent représenter des “blanc”, douze des “arabes”, un des “noirs” et deux autres semblent représenter une dernière catégorie (ils sont marron), sans que Les Surligneurs arrivent à en conclure quoi que ce soit.

L’internaute, en revanche, est sûr de son coup puisqu’il cite le très sérieux Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) comme source de sa statistique. Que cela soit dit, cette photo pose d’innombrables problèmes. De par son caractère racialiste, d’une part, misogyne d’une autre, et de l’utilisation d’une méthode aberrante, enfin.

Statistiques ethniques

D’ailleurs, des internautes ne s’y trompent pas et s’agacent : “Les statistiques ethniques sont interdites en France”, lui lâche l’un d’eux. Une croyance répandue, mais pas tout à fait vraie.

Comme l’ont déjà rappelé nos confrères du journal Le Monde, les statistiques ethniques ne sont pas strictement interdites, mais très encadrées. En effet, la loi “Informatique et Libertés” de janvier 1978 pose une interdiction de principe, dans son article 8-1 : “est interdit de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l’appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci”.

Pour autant, cette même loi de 1978 ajoute une série d’exceptions répondant à des critères précis : but poursuivi considéré comme légitime, défense de l’intérêt public, protection des personnes, dont font partie la nécessité de la recherche publique et les traitements statistiques de l’Insee.

Multitudes de confusions

Quoi qu’il en soit, notre internaute fait plusieurs confusions entre origines, nationalités et couleurs de peau. Contacté, l’Insee confirme qu’elle ne “produit en effet pas ce type d’études” et nous renvoie vers son blog pour clarifier sa méthodologie : “Le terme “statistiques ethniques” est miné. Beaucoup le comprennent au premier degré, comme des statistiques portant sur les ethnies (au sens anthropologique du terme, ou dans une acception plus sociale d’une communauté de personnes partageant une langue, un territoire, des coutumes, des valeurs…), voire comme des statistiques raciales ou sur la couleur de peau […] les statistiques ethniques qu’ils imaginent sont inexistantes en France”, écrit l’Institut.

En revanche, les “statistiques portant sur l’origine géographique des personnes et la filiation”, elles, existent : “La statistique publique produit déjà des statistiques ethniques”.

S’il est possible de mesurer la part de la population française issue de l’immigration par exemple, il est certain que l’Insee ne catégorise jamais la population sous des termes comme “noirs” et “arabes”. “Aucune enquête de la statistique publique ne comporte de telles questions, pour des raisons d’opportunité (questionnement jugé non pertinent aux regards des objectifs assignés aux enquêtes)”, détaille l’Insee aux Surligneurs.

Sur la question de l’immigration — et plus largement des étrangers — Les Surligneurs ont déjà démonté un certain nombre de fausses informations. Que ce soit sur la part des détenus étrangers dans les prisons françaises, leur nombre au sein de la population ou encore sur la réalité historique du phénomène. On ne peut que vous conseiller de vous y référer.

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