Crédits photo : VL, CC 3.0

Après avoir affirmé devant des étudiants qu’il est possible de modifier la Constitution en passant par l’article 11, le député Louis Boyard se fait surligner en direct

Création : 22 février 2024
Dernière modification : 23 février 2024

Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public

Liens d’intérêts : aucun

Fonctions politiques ou similaires : aucune

Relecteur : Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public, Université de Poitiers

Liens d’intérêts : aucun

Fonctions politiques ou similaires : aucune

Secrétariat de rédaction : Sasha Morsli Gauthier

Source : CNEWS, 20 février 2024

L’article 11 ne permet de réviser la Constitution, il faut nécessairement passer par l’article 89. Le référendum prévu à l’article 11 ne peut être organisé que pour faire adopter une loi.

L’extrait présenté par CNEWS ne précise pas dans quelle faculté s’exprimait le député LFI Louis Boyard lorsqu’il a été interrogé par un étudiant à propos d’une modification de la Constitution. En réponse, il affirmait qu’on “peut modifier la Constitution avec l’article 11”, suscitant une réaction immédiate d’une étudiante non visible dans l’extrait, lui rappelant que seul l’article 89 permet de réviser la Constitution, tandis que l’article 11 concerne le seul référendum législatif. Ce qui est vrai.

L’article 11 ne permet pas, en principe, de modifier la Constitution

L’article 11 de la Constitution prévoit la possibilité de convoquer les électeurs à l’occasion d’un référendum pour qu’ils s’expriment sur un projet de loi, dans des domaines limitativement énumérés. Si le vote recueilli est positif, la loi est adoptée. On parle alors de loi référendaire.

L’alinéa 3 de l’article 11 de la Constitution permet aussi de provoquer le référendum d’initiative partagée. Ses conditions sont strictes : un cinquième des membres du Parlement doit en être à l’initiative. Si la proposition est validée par le Conseil constitutionnel, elle doit aussi être soutenue par un dixième des électeurs, ce qui représente entre 4 et 5 millions de personnes. Une fois les conditions réunies, le référendum peut être organisé.

Cela reste un référendum dit législatif, ce qui signifie que seule une loi peut être adoptée par ce biais, à la différence d’une révision de la Constitution, qui n’est possible qu’en passant par l’article 89.

Le précédent de Gaulle invoqué par Louis Boyard

Louis Boyard appuie sa proposition en invoquant Charles de Gaulle. Lorsque ce dernier était président de la République en 1962, il est parvenu à faire modifier la Constitution pour faire en sorte que le président de la République soit élu au suffrage universel direct (à l’origine, la Constitution de 1958 prévoyait une élection indirecte par un collège de parlementaires et d’élus locaux). Cette modification de l’article 6 de la Constitution s’est faite par le référendum prévu à l’article 11. Mais hier comme aujourd’hui, cette de mode de révision constitutionnelle est majoritairement considérée comme illicite car il ne respecte pas la procédure prévue par l’article 89.

Rires dans l’assistance

Unanimes à contredire leur conférencier du jour et à s’en amuser, les étudiants ont finalement poussé Louis Boyard dans ses retranchements, le forçant à rappeler qu’il n’avait “pas terminé ses études de droit.” Or, Louis Boyard n’est pas juriste certes, mais il est député…

Les Surligneurs profitent de cette occasion pour féliciter les étudiants surligneurs d’un jour, et les appeler à rejoindre leurs camarades de M1 ou M2 qui ont déjà écrit dans nos colonnes !

 

Précision ajoutée grâce à l’attention d’un lecteur le 23 février 2023 au sein de la phrase suivante : “à l’origine, la Constitution de 1958 prévoyait une élection indirecte par un collège de parlementaires et d’élus locaux”

Une erreur dans ce contenu ? Vous souhaitez soumettre une information à vérifier ? Faites-le nous savoir en utilisant notre formulaire en ligne. Retrouvez notre politique de correction et de soumission d'informations sur la page Notre méthode.

Faites un don défiscalisé, Soutenez les surligneurs Aidez-nous à lutter contre la désinformation juridique.