Le mois de juin était le “mois des Fiertés”, et l’Union européenne n’y est pas étrangère
Autrice : Julia Lenkei, master de droit de l’Union européenne, Université de Lille
Relecteur : Vincent Couronne, docteur en droit européen, chercheur associé au centre de recherches VIP, Université Paris-Saclay
Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani
Le mois de juin est traditionnellement utilisé pour célébrer les “fiertés” dans le monde, les personnes LGBTI. L’Union européenne n’est pas étrangère à l’amélioration de la protection des droits liés à l’orientation sexuelle, mais elle reste parfois impuissante face à des États récalcitrants.
Au mois de juin, les villes européennes ont été pavoisées aux couleurs arc en ciel, signe reconnaissable des personnes LGBTI. En effet, depuis les révoltes de Stonewall de juin 1969, quartier new yorkais, le mois de juin est le mois des Fiertés. Par la suite, différentes marches des Fiertés vont être organisées afin que les personnes faisant partie de la communauté LGBTI puissent parader.
L’année 2023 marque également les dix ans de la loi sur le mariage pour tous en France. Jusqu’alors, l’Union européenne, qui ne peut pas imposer une telle réforme à la France, avait été très active pour améliorer d’égalité en interdisant toute discrimination dans l’emploi avec une “loi” européenne de 2000, et en protégeant mieux la vie privée des personnes.
Ces différents droits sont aujourd’hui surtout protégés par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (article 7).
Des textes européens visant à protéger les personnes LGBTI
Depuis que la législation européenne interdit toute discrimination sur le fondement de l’orientation sexuelle, élus et exécutif européens ont pris des positions allant plus loin encore dans le but de protéger les personnes pouvant subir de la haine et de la discrimination du fait de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Car avec le traité de Lisbonne en 2007, les chefs d’États et de gouvernements, à l’unanimité, ont ajouté une nouvelle obligation : le fait de lutter contre les discriminations sur l’orientation sexuelle dans le cadre de toutes les politiques publiques européennes (article 10 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). Cette disposition a la force la plus élevée dans la hiérarchie des normes européennes.
La résolution du Parlement européen du 18 décembre 2019 adoptée après que certaines localités en Pologne se soient déclarées “zones sans LGBTI”, s’inscrit dans cette lignée puisqu’elle vise à assurer la sécurité des personnes LGBTI que ce soit dans un cadre public ou privé. Poussée par les élus de Strasbourg, la Commission européenne a également déclaré ses intentions notamment dans son appel à une “Union de l’égalité” dans lequel elle donne des règles de conduite aux États membres de l’Union d’ici 2025.
Mais c’est aux États membres de légiférer au sein de leur territoire afin d’assurer la protection des droits de ces personnes, car ces texte ne sont pas contraignants, contrairement à la directive de 2000, qui interdit purement et simplement les discrimination dans l’emploi.
Une situation disparate entre les États membres de l’UE
Alors que l’Union européenne prône un respect des valeurs communes exprimées au sein de l’article 2 du Traité sur l’Union européenne (TUE), comme “le combat contre l’exclusion sociale et les discriminations”, tous les États membres n’y mettent pas la même énergie : les progrès sont à géométrie variable.
Par exemple, l’Espagne facilite le changement de sexe sur les documents d’identité avec sa loi nationale dite ”loi d’égalité réelle et effective des personnes trans” entrée en vigueur le 2 mars 2023. Tandis que la Hongrie, dans un mouvement radicalement opposé, a adopté en juin 2021 une loi visant à empêcher la promotion de l’homosexualité.
Néanmoins, même si les États protègent bon an mal an les droits des personnes faisant partie de la communauté LGBTI, cela n’empêche pas des groupes d’individus de les discriminer.
Un contrôle étroit par la justice européenne
En 2021, la Commission a engagé la procédure d’un recours en manquement à l’encontre de la Hongrie, considérant qu’elle avait manqué à l’une ou plusieurs de ses obligations lorsqu’elle a adopté la loi visant à empêcher la promotion de l’homosexualité. La Commission a d’abord ouvert en 2021 une procédure d’infraction à l’encontre de la Hongrie, puis a émis un avis motivé le 2 décembre 2021. Alors que la Hongrie n’a pas suffisamment respecté les recommandations de la Commission, le gouvernement dirigé par Viktor Orban a décidé en septembre 2022 de saisir la Cour, car une législation adoptée par l’Union en 2010 interdit toute discrimination à la télévision et à la radio.
Il s’agit ici d’un cas où l’Union européenne va utiliser le marché intérieur afin de contrôler la protection des droits des personnes LGBTI. C’est ce que fait la Cour de justice de l’Union européenne dans une décision du 14 décembre 2021 lorsqu’elle protège l’enfant d’un couple de personnes de même sexe.
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