La pluie peut-elle tomber seulement sur quelques mètres ?

Tuyau d’arrosage caché ou banale averse ? Sur Facebook, les internautes spéculent pour découvrir ce qui se cache derrière cette pluie immobile qui traverse une rue parisienne. Une étrange averse qui ne mesure que quelques mètres de large, qu’un passant a réussi à filmer.

Intrigué, ce badaud va passer plusieurs fois à travers les gouttes, téléphone à la main, pour nous montrer que la pluie s’arrête bien au bout de quelques mètres. Un phénomène qu’il peine à expliquer, et qu’il décrit comme “paranormal”. Comme il demande plusieurs fois si quelqu’un a une explication pour lui, Les Surligneurs se sont penchés sur la question.

La météorologiste Nathalie Huret, professeure à l’université Clermont Auvergne et spécialiste de la physico-chimie de l’atmosphère, a regardé la vidéo pour nous, et selon elle, rien de surprenant en théorie : “Cela ne m’étonne pas de voir apparaître des traces de précipitation sous forme rectiligne au sol, c’est assez fréquent.”

Et si l’on en croit les commentaires de la publication, beaucoup d’internautes ont déjà vécu la même expérience. “Ça arrive souvent, affirme l’un d’entre eux, pourquoi il neige devant la maison et pas derrière ? Pourquoi ma voiture est mouillée et pas celle du voisin ? C’est la météo !!!”

Un nuage tout ce qu’il y a de plus normal ?

Mais alors quelle est l’explication scientifique derrière ce genre de phénomènes ? Revenons pour cela à la formation des nuages. Selon Météo France, plus l’air est chaud, plus il est chargé en vapeur d’eau. Des nuages se forment quand cet air humide monte dans l’atmosphère et se refroidit.

Une fois nos nuages apparus, des précipitations peuvent se créer : “Elles se forment par la chute de gouttelettes de taille suffisante qui, au cours de leur chute, vont en collecter d’autres aux niveaux inférieurs, détaille Nathalie Huret. Seulement 20 % de l’eau atteint le sol, le reste s’évapore pendant la chute, ou reste en suspension, car les gouttelettes sont de taille insuffisante. On obtient des précipitations lorsque la captation [des gouttes d’eau se rejoignent pour en former de plus grosses, ndlr] est supérieure à l’évaporation au cours de la chute.”

Et selon la météorologiste, c’est cette condition précise qui crée des “murs” de précipitations, très localisés : “Ce n’est pas tout le nuage qui précipite, mais seulement une partie lorsque ces conditions sont réunies. On s’en rend compte très facilement lorsque l’on conduit sur l’autoroute et que la zone de précipitation est très bien délimitée puis disparaît quelques mètres plus loin : on parle de traversée de rideau de pluie.”

Et que dire du fait qu’il reste totalement statique ? Pour la physicienne de l’atmosphère, c’est souvent le cas pour les nuages d’été. “L’air étant surchauffé au sol, il va monter très vite, se refroidir et condenser la vapeur d’eau qu’il contient, formant un cumulus avec potentiellement la formation d’une zone de précipitation très localisée.”

Impossible d’être sûr

Est-ce ce phénomène qui apparaît dans notre vidéo ? Notre experte ne peut être formelle, car il lui manque beaucoup d’informations pour valider son hypothèse : “C’est aussi possible que ce soit un tuyau d’arrosage ! Pour être sûre de moi, j’aurais eu besoin au moins d’une photo du nuage. Même si j’avais eu simplement l’heure de la vidéo, j’aurais été capable de retrouver sur nos radars la trace des précipitations.”

Cette prudence est partagée par Christelle Robert, prévisionniste à Météo France : “Ça me semble improbable de voir une averse de si petite taille, surtout vu la taille des gouttes.” Pour elle, c’est aussi l’immobilité du phénomène qui pose question. “Même pour des averses très réduites, il est très étonnant de ne pas pouvoir observer, proche de l’averse, le sillage de la pluie déjà tombée en train de sécher.”

Elle a même retrouvé le lieu en question pour nous donner une autre théorie, déjà évoquée par notre météorologiste. Nous sommes donc au 55, rue Jouffroy d’Abbans à Paris, dans le 17ᵉ arrondissement. Pour la prévisionniste, d’autres explications sont plausibles : “Je vois aussi des plantes sur les toits, ce qui pourrait indiquer la présence d’un tuyau d’arrosage oublié.”

Sans connaître l’heure de l’averse, ou la forme du nuage, impossible pour nos deux spécialistes d’affirmer si nous sommes devant un phénomène naturel ou artificiel. Quant au paranormal, aucune n’a souhaité l’évoquer…

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